Le geste d'écrire
Vilém Flusser
Il s'agit d'une action par laquelle un matériau est mis sur une surface, (par exemple: de la craie sur un tableau noir, ou de l'encre sur une feuille), pour former des dessins, (par exemple: des lettres). Les outils de cette action, (par exemple: le crayon ou la machine à écrire), sont des instruments pour ajouter un matériau à un autre. On pourrait donc supposer que le geste d'écrire est un acte constructif, si par "con—struction" nous voulons dire: ajouter divers matériaux pour former une structure nouvelle. En réalité, le contraire est le fait. Par son "essence", (eidos), le geste d'écrire est un acte d'excavation, de gravure, et le verbe grec "graphein" en est toujours le témoin. Sa technique actuelle cache cette essence. Il y a quelques milliers d'années qu'on s'est mis à gratter des surfaces des briques mésopotamiennes, et c'est cela, pour notre tradition, l'origine de l'écriture. Il s'agit d'un geste dé—structif, d'un acte qui enlève. Écrire, c'est faire des trous. C'est in—scrire, et ce n'est pas sur—scrire, quoique la technique le nie à présent. Un texte êcrit n'est pas une formation sur une surface, mais une in—formation dans une surface. Il s'agit d'un geste pénétrant, négatif, par son origine, et par son in—tention, quoique par sa technique le geste soit son propre contraire.
coucou
du chocolat
de la tarte
coché